L’examen du « Projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises » (PACTE) s’est terminé à l’Assemblée nationale le 16 mars 2019. Simplifier la création et la transformation des entreprises, encourager l’actionnariat salarié, développer l’épargne retraite… Ce texte est riche de mesures très positives pour la croissance des entreprises et pour les salariés. Cependant, ces derniers jours, de nombreuses informations inexactes circulent sur les réseaux sociaux. Il m’a semblé important de clarifier quelques points :
« Tout s’est joué le 16 mars à 6h15 du matin » – FAUX
Le texte est en discussion depuis l’été 2018 : après deux passages à l’Assemblée et un premier au Sénat, son adoption définitive n’a pas encore eu lieu. S’il est vrai que le vote du texte global est intervenu dans la nuit de vendredi à samedi, à 6h15 du matin, et après 3 jours de débat, de nombreux articles ont été examinés antérieurement. Par exemple, l’examen des « privatisations » a eu lieu dans la journée du jeudi 14 mars. De plus, cela fait plus d’un an que le texte fait l’objet de très nombreux échanges et concertations avec les associations, syndicats et acteurs du monde de l’entreprise.
Ces votes tardifs, au beau milieu de la nuit sont trop souvent le fruit de très nombreux amendements déposés par les différents groupes politiques. Cela pointe un problème de fonctionnement du Parlement qui mérite d’être réformé, selon moi. Nous pourrons aborder ces sujets lors de la réforme à venir du Règlement de l’Assemblée, afin de rendre le Parlement et le travail législatif plus efficaces.
« L’Etat abandonne le groupe Aéroports de Paris » – FAUX
Il ne s’agit pas tout à fait d’une privatisation, mais de la mise en place d’un mécanisme proche de celui d’une concession. L’exploitation se fera par un opérateur privé d’infrastructures, et reviendra à l’Etat après une période de 70 ans. Ce mécanisme est déjà utilisé pour le Viaduc de Millau, par exemple.
De plus, l’Etat s’est engagé à la transparence du cahier des charges de l’opération, à la révision des tarifs tous les 5 ans et au maintien du statut des personnels actuels et la garantie de leur emploi. Cumulés à la possibilité de véto pour l’Etat qui s’assure ainsi qu’aucune cession de foncier ne puisse avoir lieu sans son accord formel, la situation me semble bien encadrée et financièrement pertinente. En effet, la concession permettra à l’Etat de bénéficier de recettes stables avoisinant les 250 millions par an. Enfin, la sécurité aux frontières, qui est un élément important de la souveraineté demeure un service public directement assuré et contrôlé par l’Etat.
« L’Etat fait de mauvais choix stratégiques et financiers en se retirant du capital d’ENGIE et de La Française des Jeux » – FAUX
L’élargissement de l’actionnariat au secteur privé de La Française des Jeux lui offrira des opportunités de développement. Elle restera cependant bien sous le contrôle strict de l’État ; une autorité indépendante sera mise en place et offrira les garanties en termes de lutte contre le jeu excessif, la vente à des mineurs, la fraude et le blanchiment d’argent.
Pour ce qui est d’ENGIE, l’Etat n’envisage pas de sortie rapide du capital. Le texte prévoit de supprimer le seuil minimum de participation de ses parts, fixé actuellement à 23,64 %.
L’argent de la vente de ces participations sera utilisé pour partie pour rembourser la dette publique. Alors qu’elle devrait atteindre 98,6 % du PIB, en 2019, cela pourrait réduire de 0,5 point ce chiffre et éloigner le dépassement du symbolique seuil de 100 % du PIB. Une autre partie servira à créer un fonds de 10 milliards d’euros pour l’innovation.
« La loi PACTE supprime les tarifs réglementés du gaz pour se mettre en conformité avec le droit européen » : VRAI
Il s’agit de tirer les conséquences de récentes décisions du Conseil d’État qui ont déclaré contraires au droit européen les tarifs réglementés de vente du gaz naturel. De plus, il s’agit déjà d’une réalité du marché du gaz : à la fin 2018, 60 % des clients résidentiels avaient souscrit une offre de marché, c’est-à-dire qu’ils n’étaient plus au tarif réglementé, selon le baromètre de la Commission de Régulation de l’Energie.
Le texte comprend aussi des mesures d’accompagnement afin de protéger et d’accompagner les consommateurs telles que l’appel à un fournisseur de secours en cas de défaillance du fournisseur, ou encore l’accès à un fournisseur de dernier recours pour les clients qui n’en trouveraient aucun.
« La loi PACTE supprime les seuils sociaux (*) » – FAUX
Il ne s’agit pas d’une suppression des seuils d’effectifs de salariés dans les entreprises, mais d’un allègement et d’une simplification. Aujourd’hui, il existe 199 seuils différents. Cette complexité est souvent pointée du doigt par les entreprises comme un frein à l’emploi. Cette simplification passera notamment par le regroupement des seuils autour des niveaux de 11, 50 et 250 salariés.
La loi PACTE, c’est avant tout une loi en faveur des entreprises et des salariés
Cette loi, riche de 74 articles, contient de nombreuses mesures facilitant la création et la vie des entreprises, en mettant par exemple en place un guichet unique pour l’accomplissement des formalités administratives.
Elle permet aussi de développer l’épargne salariale puisqu’elle supprime le forfait social versé au titre de l’intéressement pour les entreprises de moins de 250 salariés.
Il s’agit donc d’un texte au spectre large, qui a l’ambition globale de moderniser le monde de l’entreprise et ainsi d’encourager la croissance économique.
Son examen n’est pas tout à fait terminé : actuellement débattue au Sénat, elle reviendra ensuite à l’Assemblée nationale pour le vote définitif.
* Définition « seuils sociaux » : nombres minimum de salariés au-dessus duquel sont déclenchées de nouvelles obligations pour les entreprises.